Orthophotographie
Introduction
Vous avez besoin de connaître avec précision la forme d’un terrain, l’emplacement de bâtiments, ou la configuration d’un site… mais les plans techniques vous semblent illisibles, et les courbes de niveau, trop abstraites ?
Et si une simple image, aussi lisible qu’une photo mais aussi précise qu’un plan topographique, pouvait répondre à vos besoins ?
C’est exactement ce que permet l’orthophotographie.
Issue de la rencontre entre l’imagerie et la cartographie, cette technique offre une représentation fidèle du réel, à l’échelle, sans distorsion, et parfaitement exploitable pour vos projets. Qu’il s’agisse d’aménagement urbain, de conservation du patrimoine, d’archéologie ou d’études environnementales, l’orthophotographie devient un outil de référence pour visualiser, mesurer, analyser.
Dans cet article, nous allons découvrir ce qu’est concrètement l’orthophotographie, comment elle est produite, et pourquoi elle est devenue un pilier de nombreux métiers.
Qu’est-ce que l’orthophotographie ?
L’orthophotographie est une image obtenue à partir de photographies (le plus souvent aériennes mais aussi terrestres) dont les déformations liées à la perspective et au relief ont été corrigées. Contrairement à une photo classique, où les objets proches paraissent plus grands et les lignes sont déformées, une orthophotographie restitue une image projetée selon un plan défini, avec des dimensions fidèles et une géométrie rigoureuse.
Ce plan peut être horizontal (vue du dessus, comme dans les applications cartographiques traditionnelles), mais aussi vertical ou oblique, par exemple pour représenter avec précision une façade de bâtiment.

Cette flexibilité en fait un outil précieux non seulement pour cartographier des territoires, mais aussi pour analyser des élévations architecturales ou des parois complexes.
Le résultat est une image dite orthorectifiée, à la fois visuelle, précise, et directement exploitable pour la mesure, la modélisation ou l’analyse technique.

Origine et évolution
L’orthophotographie n’est pas une invention récente. Elle trouve ses racines au début du XXe siècle, à une époque où la photographie aérienne commence à être utilisée à des fins militaires et cartographiques. Dès 1908, l’armée française développe des procédés pour transformer des clichés pris depuis des avions en cartes exploitables. À l’époque, il s’agissait essentiellement de corriger à la main les distorsions visibles sur les photographies, un travail lent et complexe.
Avec l’évolution des technologies, l’orthophotographie a connu une transformation radicale. Le passage à la photographie numérique, l’arrivée des drones, des satellites, des capteurs photogrammétriques haute résolution, et surtout des modèles 3D numériques de terrain (MNT) ont permis d’automatiser et de fiabiliser l'ensemble du processus.
Aujourd’hui, une orthophotographie est souvent générée à partir d’un nuage de points 3D, calculé par photogrammétrie ou scannage laser (LiDAR), sur lequel on vient projeter les textures photographiques. L’image finale peut alors être projetée sur un plan horizontal, vertical ou incliné, selon l’usage prévu : analyse de terrain, étude de façade, inspection d’ouvrage, suivi de chantier, etc.
Les logiciels modernes de traitement d’images permettent également d’effectuer des corrections radiométriques, pour obtenir une homogénéité d’éclairage et de couleur sur toute la surface. On obtient ainsi une image réaliste, précise, et immédiatement lisible, bien plus intuitive qu’un plan technique.
Comment fonctionne l’orthophotographie ?
Produire une orthophotographie est un processus technique en plusieurs étapes, qui repose sur la capture d’images, l’exploitation de données géospatiales, et des traitements informatiques avancés. L’objectif : transformer des photographies classiques, souvent déformées par la perspective ou le relief, en une image géométriquement fiable, à l’échelle, et exploitable pour la mesure.
Ce processus se déroule généralement en trois grandes phases : la capture, le traitement, et la production de l’image finale.

Capture des images sur le terrain
La première étape consiste à acquérir des images du site à modéliser. Cette acquisition doit suivre un protocole rigoureux pour garantir un résultat exploitable.
Dispositifs utilisés
Les prises de vue peuvent être réalisées depuis :
- des drones équipés d’appareils photo haute résolution,
- des avions ou des hélicoptères avec des caméras cartographiques,
- des appareils terrestres ou montés sur des mâts télescopiques, notamment pour les façades ou structures verticales.
Prise de vues avec recouvrement
Chaque image est capturée de manière à se chevaucher avec les précédentes et les suivantes. Ce recouvrement, généralement de 60 à 80 %, est indispensable : il permet aux logiciels de photogrammétrie d’identifier automatiquement des points homologues (les mêmes détails visibles sur plusieurs images), pour reconstituer la géométrie de la scène.
Conditions de prise de vue
L’orientation de la caméra, l’altitude de vol, et les conditions lumineuses doivent être aussi constantes que possible. Une lumière diffuse et homogène (sans ombres marquées) permet d’obtenir une qualité d’image optimale. Un ciel nuageux homogène est parfait pour les prises de vues car il évite d'avoir des ombres portées.
Données géospatiales et traitement photogrammétrique
Les images seules ne suffisent pas. Pour produire une orthophotographie précise, il faut leur associer des données géospatiales.
Géoréférencement des images
Chaque cliché est associé à des coordonnées GPS (ou GNSS) précises, et parfois à des données d’orientation (compas, inclinomètre, centrale inertielle). Cela permet de situer chaque image dans l’espace réel, avec une grande précision.
Modélisation 3D du terrain
Grâce à la photogrammétrie, le logiciel détecte automatiquement les points communs entre les images, et utilise ces informations pour créer un nuage de points 3D. Ce modèle numérique du terrain ou de la façade permet ensuite de corriger les effets liés au relief et à la perspective.
Correction géométrique
C’est l’étape centrale : l’image est déformée mathématiquement pour éliminer les distorsions causées par :
- l’angle de prise de vue (perspective),
- la topographie du terrain (relief, pentes, différences d’altitude),
- les défauts optiques de la caméra.
On obtient alors une projection orthogonale du sujet : les distances, angles et surfaces sont désormais mesurables avec fiabilité.
Production et exploitation de l’orthophotographie
Une fois toutes les images corrigées, elles sont assemblées pour former une mosaïque continue.
Création de l’orthophotographie
Le résultat final est une orthoimage, généralement exportée dans un format géoréférencé (comme GeoTIFF). Elle peut être projetée sur un plan horizontal (vue du dessus), mais aussi sur un plan vertical ou incliné, notamment pour les façades ou les structures complexes.
Intégration dans des outils d’analyse
L’orthophotographie peut être directement utilisée comme fond de plan dans un logiciel de Système d’Information Géographique (SIG). Elle sert alors de support pour :
- tracer des éléments (bâtiments, réseaux, zones à risque),
- effectuer des mesures de surface ou de distance,
- croiser avec d’autres données (cartes, documents d’urbanisme, données environnementales).
Domaines d’application de l’orthophotographie
L’orthophotographie est utilisée dans une grande variété de secteurs, là où il est nécessaire de combiner un visuel clair avec des données fiables et mesurables. Elle permet de gagner en précision, en efficacité, et souvent en compréhension, en rendant l’information visuelle immédiatement accessible, même aux non-techniciens.
Voici quelques-uns des domaines où elle s’impose comme un outil incontournable.
Aménagement du territoire et urbanisme
L’orthophotographie permet aux collectivités et aux aménageurs de :
- dresser un état des lieux précis d’un quartier ou d’une commune,
- analyser l’évolution de l’occupation des sols,
- appuyer la concertation autour d’un projet grâce à un support visuel accessible,
- croiser les données avec des documents d’urbanisme (PLU, zonages, etc.).
Elle est particulièrement utile dans le cadre des études d’impact, des enquêtes publiques, ou encore pour la révision des documents d’urbanisme.

Architecture et modélisation du bâti
En architecture, l’orthophotographie est utilisée pour :
- relever des façades de manière rapide et précise,
- documenter un bâtiment existant avant réhabilitation,
- servir de base de travail dans un logiciel de Dessin Assisté par Ordinateur (DAO) ou de Modélisation des Informations du Bâtiment (BIM).
Elle offre une vue normée et à l'échelle, sur laquelle il est possible de dessiner, mesurer ou annoter directement.
Patrimoine, archéologie et conservation
De nombreux acteurs du patrimoine utilisent l’orthophotographie pour :
- conserver une trace fidèle de l’état d’un site ou d’un monument,
- analyser des dégradations ou des mouvements de structure dans le temps,
- planifier des restaurations en s’appuyant sur des relevés géométriques fiables,
- produire des documents de médiation ou de communication à destination du public.
Elle peut également être utilisée en archéologie pour cartographier des structures enfouies révélées par le sol, ou pour restituer des murs, mosaïques ou vestiges en plan ou en élévation.
Études environnementales et suivi du territoire
L’orthophotographie est un outil de suivi des milieux naturels. Elle permet :
- de détecter des évolutions du paysage (érosion, montée des eaux, végétalisation…),
- d’analyser les changements d’occupation des sols,
- de croiser des données visuelles avec des informations topographiques, hydrologiques ou climatiques.
Elle est également utilisée dans la cartographie des risques (glissements de terrain, crues, incendies, etc.) ou dans le suivi d’impacts environnementaux liés à des chantiers ou des projets industriels.
Travaux publics et grands chantiers
Sur les chantiers d’infrastructure, l’orthophotographie permet :
- de documenter l’avancement des travaux à chaque étape,
- de vérifier la conformité entre ce qui a été réalisé et les plans initiaux,
- d’anticiper des problèmes de coordination ou de superposition entre différents corps d’état.
Elle sert aussi de base pour produire des plans de recollement ou intégrer les données dans un logiciel de gestion de chantier.
Agriculture de précision
Dans le secteur agricole, l’orthophotographie joue un rôle de plus en plus important :
- elle permet de localiser avec précision les parcelles, les haies, les zones cultivées,
- combinée à des capteurs multispectraux, elle offre des informations sur l’état sanitaire des cultures,
- elle aide à ajuster les apports d’eau, d’engrais ou de produits phytosanitaires, en fonction des besoins réels.
Elle est aussi utilisée pour la gestion des aides agricoles, en vérifiant la surface réellement exploitée ou la conformité des déclarations.
Pourquoi l’orthophotographie change la donne ?
Imaginez une image sur laquelle vous pouvez non seulement voir, mais aussi mesurer. Une photo qui ne triche pas avec la perspective, où chaque centimètre est fiable, où les distances sont justes, où un bâtiment reste droit, même en bord de cadre. Une image sur laquelle vous pouvez poser des annotations, tracer un plan, vérifier une surface, ou simplement montrer un site à quelqu’un qui n’y est jamais allé, et qu’il comprenne tout, en un coup d’œil.
C’est ce que permet l’orthophotographie.
Un outil de précision
Contrairement aux photos classiques, l’orthophotographie élimine les distorsions : tout est mesurable, à l’échelle. Les longueurs, les angles, les surfaces sont fidèles à la réalité. Fini les approximations ou les interprétations subjectives. On gagne en rigueur, mais aussi en confiance dans les données.
Un support visuel riche et lisible
Là où une carte topographique demande un apprentissage, l’orthophotographie est immédiatement compréhensible. On y voit les matières, les formes, les détails. Elle remplace souvent plusieurs documents techniques à elle seule. Et ce réalisme visuel est précieux, notamment quand il faut convaincre, expliquer, ou décider.
Un langage commun
Parce qu’elle est à la fois technique et visuelle, l’orthophotographie devient un outil de dialogue entre experts et non-experts. L’architecte, l’ingénieur, l’élu, le riverain ou le client voient tous la même chose. Cela simplifie les échanges, accélère les prises de décision, et réduit les incompréhensions.
Une intégration fluide dans les outils métiers
Qu’il s’agisse de logiciels de CAO, de SIG ou de plateformes collaboratives, l’orthophotographie s’intègre facilement. Elle devient une couche d’information exploitable, modélisable, partageable. C’est un atout dans tous les projets multi-intervenants.
En bref
L’orthophotographie n’est pas juste une belle image : c’est une représentation fidèle de la réalité, compréhensible par tous et exploitable à tous les niveaux d’un projet. De l’analyse à la communication, elle permet de voir et comprendre, mais aussi de mesurer et décider.
Que vous soyez urbaniste, architecte, conservateur, ingénieur, chercheur ou agriculteur, l’orthophotographie est un outil qui allie précision, lisibilité et efficacité. Une façon nouvelle de lire l’espace… et de mieux le transformer.